06.2006 | Festival Lavaux Classic et Grand Théâtre de Genève (CH)
En 2006, Jean-Christophe de Vries et le pianiste et chef d’orchestre Antoine Rebstein créent pour la première fois hors de Russie la cantate satirique « Rayok antiformaliste » de Dimitri Chostakovitch (1906-1975) dans une version scénique. La création de cette version mise en scène pour la première fois a eu lieu dans le cadre du Festival Lavaux Classic et la production a été reprise plus tard dans l’année par le Grand Théâtre de Genève.
Mise en scène : Jean-Christophe de Vries
Direction musicale : Antoine Rebstein
Introduction jouée : Mathilde Reichler (musicologue)
Président de séance : Dimtri Tikhonov (basse)
Jedinisin : Mikhail Smirnov (basse-baryton)
Dwoïkin : Harry Draganov (baryton-basse)
Troïkin : Alexandre Diakoff (baryton-basse)
Instrumentistes : Juliette Granier (piano) et Thierry Besançon (percussions)
Chœur : ensemble ad hoc (Cully) et Chœur du Grand Théâtre (Genève)
L’œuvre
En 1948, Dimitri Chostakovitch (1906-1975) ne peut plus contenir sa colère. Les autorités viennent de taxer sa musique de « formaliste », à savoir cacophonique et décadente. Il commence alors secrètement la composition de la cantate satirique « Rayok antiformaliste », pour quatre basses, piano et chœur mixte. Une partition qu’il travaillera pendant 19 ans dans le plus grand secret.
« Rayok antiformaliste » reprend des vrais discours du Parti et tourne en dérision la première assemblée de l’Union des Compositeurs en 1948 au Kremlin, lors de laquelle il était question du réalisme et du formalisme en musique. Quatre solistes basses au total : Jedinisin, Dwoïkin, Troïkin et le Président de séance. Derrière le visage des trois premiers se cachent apparemment Staline, Jdanov et Chepilov, trois dirigeants soviétiques ayant rendu la vie de Chostakovitch particulièrement difficile.
Pour rendre les choses encore plus ridicules et explicites, l’œuvre est introduite par une « Préface » qui raconte comment le manuscrit de la cantate a été découvert dans une benne à ordures par un certain Opostilov dont on apprend qu’il a ensuite disparu dans une fosse à purin. Les vidangeurs, ayant essayé en vain de retrouver l’homme, concluent sur ces mots : « Il y a des gens comme ça, on ne peut les distinguer des ordures ! ».
Cette version scénique
Cette version créée au Festival Lavaux Classic en 2006 est la première représentation hors de Russie et la première version mondiale mise en scène. Elle présente l’œuvre sous un angle particulier et innovateur. Le rajout d’une partie de percussion est un des éléments clé de cette version (Chostakovitch n’avait que suggéré cette partie en inscrivant quelques notes de cymbales dans son manuscrit).
L’œuvre est enrichie d’une mise en scène particulièrement originale qui présente l’œuvre dans son entièreté. Après une lecture de la « Préface » en français, suit alors la musique de Chostakovitch en langue russe sous-titrée en français. Les solistes s’adressent au public depuis la scène comme de vrais orateurs. La pianiste, elle, incarne une secrétaire du Parti et tape sur son piano comme si elle faisait le procès-verbal de la séance. Le chœur, dispersé « incognito » parmi les spectateurs, réagissent, protestent en chantant selon les indications musicales du compositeur.
Historique de l’oeuvre
1989 : création de l’œuvre à Moscou (RU) en janvier par Mstislav Rostropovitch au piano puis en septembre par Valeri Polianski
1992 : enregistrement de l’œuvre en anglais par Mstislav Rostropovitch
2003 : enregistrement au Conservatoire de Moscou (RU) dans la version définitive dans l’orchestration par Vladimir Spivakov qui en signe l’orchestration et la dirige
2006 : création scénique au Festival Lavaux Classic (CH) puis au Grand-Théâtre de Genève par Jean-Christophe de Vries et Antoine Rebstein